vendredi 6 février 2009

Les vaches philosophes.

Chacune des notions que le programme de philosophie nous demande d'étudier a ses difficultés. Je commence souvent par les rappeler, en préambule à l'étude d'une nouvelle notion, avant de travailler un exercice du baccalauréat, dissertation ou commentaire de texte. Ainsi, cette semaine, nous avons abordé avec mes Littéraires la religion. J'ai prévenu: il y a parmi nous des croyants, des incroyants et des indifférents. Mais pour tous, la difficulté est la même: passer outre son enthousiasme, son rejet ou son désintérêt pour la religion afin d'aller, comme pour n'importe quelle autre notion, vers un examen objectif, détaché, critique.

Sinon, gare aux préjugés! Le croyant ne voudra pas interroger sa foi tellement elle lui semble évidente, l'athée ou l'anticlérical ne fera aucun effort pour approcher une pensée qui lui est étrangère, l'agnostique ou le goguenard n'ira pas plus loin qu'un sourire de dédain ou de commisération. "Ne pas rire, ne pas pleurer, comprendre", conseillait Spinoza. Je dirai autrement: ne pas aimer, ne pas détester, ne pas ignorer, réfléchir. Le croyant aime trop, l'incroyant déteste trop, l'agnostique ignore trop.

Pas facile? J'en conviens. C'est pourquoi c'est de la philosophie, c'est pourquoi aussi c'est un travail scolaire. Impossible? Mais si, puisque c'est un travail, à prendre comme tel. Je ne demande pas au croyant d'abjurer, à l'athée de se convertir, à l'indifférent de se passionner, je leur demande de philosopher. J'utilise parfois cette image, qui vaut ce qu'elle vaut, comme toute image: laisser votre ferveur, votre antipathie ou votre torpeur au vestiaire; dans la classe, ne pensez qu'à penser, c'est le job. Une fois dehors, vous reprenez vos convictions, vos répulsions et vos mépris. La classe, la rue, chacun chez soi et les vaches seront bien gardées.

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