samedi 14 février 2009

Le jeune et le vieux.

Quand j'étais lycéen, il y avait deux profs de philo dans mon établissement: un jeune, la trentaine, agrégé (mon prof), un vieux, la cinquantaine, certifié. Le premier enseignait aux littéraires (les A , comme on disait alors), le second aux scientifiques (les C). A mes yeux, l'un avait un prestige, une prestance que l'autre n'avait pas. Et aussi un mystère: c'était un ancien prêtre. Bref, une situation propice à l'admiration. Je ne sais pas si l'âge intervenait là-dedans.

A 33 ans, quand je suis devenu à mon tour prof de philo, mon maître de stage, mon tuteur, au lycée Colbert à Reims, avait la cinquantaine bien entamée, cheveux gris et yeux cernés. Il me disait, avec beaucoup de regret dans la voix: "C'est un atout auprès des jeunes élèves d'être un jeune prof". Je ne suis pas certain qu'il avait raison, mais il vivait un peu difficilement cette différence d'âge, surtout par rapport à moi.

Un an plus tard, j'étais affecté au lycée Henri-Martin, premier poste que je n'ai pas quitté. Plus de tuteur, mais j'étais le nouveau, le jeunot, et il y avait un ancien, barbe blanche, Monsieur Jamet, un an à tirer avant la quille. Il m'a guidé, orienté, je n'ai bien sûr pas tout écouté, tout suivi. Il est parti, je l'ai en quelque sorte remplacé.

Et aujourd'hui, 15 ans après? Eh bien c'est moi le vieux, et j'ai accueilli à la dernière rentrée un jeune agrégé, Pascal! Bon, je force un peu la comparaison: j'ai des cheveux gris mais pas une barbe blanche, j'approche de la cinquantaine, je ne la termine pas. Il n'empêche que 20 ans d'écart, c'est presque une génération. Et puis, autour de moi, parmi les collègues, je sens la relève: ceux d'il y a 15 ans sont moins nombreux, les nouveaux s'imposent, s'installent, font oublier qu'ils sont nouveaux.

Ça donne quoi, ça change quoi? Pour le moment, pas grand-chose. Je me sens mieux dans ma peau de prof, et meilleur prof qu'il y a 15 ans. Mes jeunes collègues, je ne les comprends pas toujours dans leurs réactions, leur psychologie. Mais à part ça, ça va. Dans 10 ans, j'en dirai quoi, quand je serai devenu un vrai vieux prof (étant entré tard dans le métier, j'en sortirai tard)? Et ça fait quoi d'être un vieux prof? Je ne sais pas, mais je vous promets cette année-là un billet sur ce sujet.

5 commentaires:

Anonyme a dit…

Vous êtes devenu professeur de philo à 33 ans ? C'est pas plutôt 23 ?

Anonyme a dit…

Si vous êtes devenu prof à 33 ans . Mais que faisiez vous avant ?

Emmanuel Mousset a dit…

Oui,je suis devenu prof à 33 ans. Avant, j'ai exercé plusieurs boulots: manutentionnaire dans une librairie, commercial dans une régie publicitaire, employé à la Poste, agent de sécurité.

Anonyme a dit…

Nan mais pourquoi avoir fait des petits boulots avant ?

Emmanuel Mousset a dit…

Pour gagner ma vie.