jeudi 3 septembre 2009

Le meilleur des mondes.



Les parents s'extasient souvent sur leur très jeune enfant : qu'est-ce qu'il est mignon, gentil à cet âge-là, il faudrait qu'il ne change pas, qu'il soit tout le temps comme ça ! C'est bien sûr un rêve de parents : l'enfant va changer, grandir, acquérir son indépendance, se forger une personnalité, devenir moins amusant, parfois teigneux. Le gentil bébé va se transformer en gamin hargneux, puis en adolescent en crise. C'est à ce moment où les parents commencent à déchanter, que le plus dur de l'éducation se fait sentir.

Une classe pour un enseignant, c'est pareil, comme moi ce matin avec mes Scientifiques, que je rencontrais pour la première fois. Tout nouveau tout beau. Ils sont gentils, disciplinés, ne parlent pas, ne protestent pas, écoutent et notent tout ce que je dis. Bref la classe idéale pour un prof ! Leurs visages me sont indifférenciés, comme le sont entre eux les bébés, dans une stricte et parfaite égalité. Je ne les connais pas, ils ne me connaissent pas, c'est merveilleux, c'est le meilleur des mondes possibles.

Mais comme l'enfant est condamné à changer, la classe aussi. Elle va s'émanciper, prendre ses aises, résister à mon enseignement au fil des jours, assez rapidement, et c'est là où le vrai boulot pour moi va commencer. Les élèves font se distinguer, des visages vont émerger, des personnalités vont se mettre à exister, des clans vont se former, une hiérarchie va s'instaurer, mes notes vont établir un ordre douloureux, bref une micro-société va s'organiser, que je vais devoir gérer douloureusement.
Il faut, élèves et enseignants, que nous sachions savourer ces premières heures, ces premières jours, que plus jamais ensuite nous retrouverons, qui sont également comparables aux premiers temps de l'amour, avant que la routine et les nuages ne s'installent. Nous vivons, en chaque début d'année, une sorte de paradis scolaire, où l'harmonie domine à peu près entre nous, où la curiosité est encore intacte pour quelques temps, où l'enthousiasme n'a pas été érodé par de mauvaises notes ou des cours inévitablement pesants. Apprécions cette courte période de bonheur, ce miracle qui n'aura lieu qu'une seule fois, que je ne connaîtrai à nouveau que l'an prochain à la rentrée.

En photos les informations distribuées hier aux élèves par les professeurs principaux à propos de la grippe A.

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