dimanche 8 mars 2009

Tous plus intelligents!

J'ai commencé ce dimanche la lecture du passionnant ouvrage d'Emmanuel Todd, "Après la démocratie" (2008, Gallimard). Le chapitre 2 est consacré à l'École: "Stagnation éducative et pessimisme culturel". C'est plein de bon sens et de vérité, qui tordent le cou aux idées reçues.

Par exemple, tout le monde se désole du nombre d'élèves qui quittent le système scolaire sans aucune qualification ou diplôme. On cite souvent le chiffre de 170 000 par an, et on a légitimement peur. Mais quel pourcentage cela représente-t-il? 7,5%, qui reste stable depuis 1990. C'est encore trop, bien sûr. Mais savez-vous combien ils étaient en 1965? 35%! Ça relativise pas mal de choses.

On déplore aussi que le niveau baisse. C'est devenu une sinistre ritournelle. Qu'en est-il vraiment? 34,3% d'une génération a eu son bac général en 2007. Combien en 1950? 4,8%! Vous me direz peut-être que le bac ne vaut plus rien? C'est gentil pour l'École et les enseignants! Prenons alors un autre critère: les tests de raisonnement qu'ont passés les conscrits entre 1981 et 1995, qui montrent une hausse globale du niveau intellectuel de près de 18%.

Autre cliché: les analphabètes seraient de plus en plus nombreux! C'est complètement idiot. L'alphabétisation de masse (qu'on mesure à la capacité ou non de signer l'acte de mariage) est acquise au XIXème, et ce mouvement de fond venait de loin, du Moyen Âge. En 1911, 96% des 20-24 ans sont alphabétisés. Aujourd'hui, tout le monde sait lire, écrire et compter. Ceux qui prétendent que l'École n'assure plus cette tâche sont stupides ou vicieux. En revanche, il y a un usage de la langue écrite qui n'est pas correctement maîtrisé. Mais cela ne date pas de notre époque, et c'était pire avant.

Dans la même veine, remarquons que le nombre d'étudiants a très fortement progressé, de 200 000 en 1950 à 2 275 000 en 2005-2006. Ce qu'Emmanuel Todd démontre, c'est qu'il y a une aspiration irrépressible des sociétés modernes à plus d'éducation, que le niveau n'a donc cessé de monter, et spectaculairement, même s'il stagne depuis une dizaine d'années. Tous les enseignants devraient lire ce chapitre 2 et en ressortir enthousiastes, confiants. C'est tout le mal que je leur souhaite, en cette veille de rentrée.

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