mercredi 25 mars 2009

La fille qui passe.

Ce matin, 8h00, devant ma salle de classe, au milieu des élèves qui attendent, alors que je cherche ma clé pour ouvrir, une fille que je ne connais pas me demande quelque chose que je n'entends pas. J'ai horreur de ça, je ne sais pas faire deux choses à la fois, ouvrir une porte et écouter quelqu'un. J'invite la fille à venir me voir à mon bureau, il suffit qu'elle patiente 30 secondes. Mais l'entrée en matière se présente mal...

30 secondes plus tard, mon cartable sur le bureau, cette élève que je ne connais pas me demande avec un sourire très large et innocent si elle peut assister à mon cours. Allons bon! Qu'est-ce que c'est que ça? Génétiquement, un élève est programmé pour fuir les cours, pas pour les désirer. Je m'interroge, mettez-vous à ma place...

Et puis, par nature, je me méfie des sourires très larges et innocents, surtout quand ils viennent des élèves, surtout d'une élève que je ne connais pas. Je vois le mal partout? Oui, peut-être. En tout cas, je ne reçois pas de bonne humeur la demoiselle, je suis même un peu brutal avec elle, répondant à sa question par une autre question: d'où tu viens? Pourquoi t'es là? (je résume, mon interpellation était tout de même plus douce).

Elle vient de TL1, elle veut assister à un de mes cours, c'est tout. Je pourrais sauter de joie (une élève qui s'intéresse tellement à la philo qu'elle fait des heures sup avec un autre prof!), je pourrais même penser, narcissiquement, qu'elle vient pour moi, pour le génie de mon cours. Mais j'ai quand même un peu de métier, je me méfie des élèves et je me méfie encore plus de moi-même, de mes impressions, de mes emballements.

Je lui dis d'abord que oui, elle peut rester, à condition de ne pas mettre le bazar. Parce que la copine qui vient voir la copine, je connais et j'apprécie pas. Ça donne souvent deux pipelettes. Plus subtile, plus vicieuse, l'élève qui vient comparer son prof avec un autre prof pour pouvoir dire tout le mal qu'elle pense du premier. L'herbe est toujours plus verte dans la prairie du voisin. Ça, je déteste, il ne faut pas me la faire.

La dernière hypothèse pour expliquer cette inhabituelle et rarissime visite, c'est tout bêtement la curiosité, qui est comme chacun sait "un vilain défaut". L'élève veut voir comment ça se passe avec l'autre prof de philo. Vieux fantasme scolaire. Sauf que la classe n'est pas un zoo et que je ne suis pas une bête de cirque à qui on lance des cacahuètes.

Le cours s'est déroulé, la fille a écouté (sans prendre cependant de notes). Tout s'est finalement bien passé. Mes préventions, mes soupçons sont peut-être excessifs. Mais mieux vaut prévenir que guérir. Elle est partie sans rien ajouter. Reviendra-t-elle? Elle sera la bienvenue...

5 commentaires:

Anonyme a dit…

"Génétiquement, un élève est programmé pour fuir les cours, pas pour les désirer." ^o^
Vous avez tout compris. Mais vous semblez être un peu méfiant avec les élèves... Et la curiosité n'est pas QUE un vilain défaut. Si ce n'est pas du voyeurisme, elle peut être positive, au contraire. Ne parle-t'on pas de "curiosité intellectuelle"? Et puis, mieux vaut être curieux que borné ou égocentrique.

Emmanuel Mousset a dit…

C'est vrai.

Méfiant? Disons prudent.

La fille a dit…

Je comprends votre méfiance même si j'avoue avoir été un peu refroidie à mon arrivée. A toutes ces interrogations sur les raisons de ma venue je vais vous donner des réponses qui ne seront peut être pas à la hauteur de vos attentes mais qui vous éclaireront tout de même. Je viens de la TL1 où je ne me sens pas bien du tout depuis le 2 septembre, et j'ai passé mon année de Première dans la L2 ... Ma motivation première était donc comme je l'ai déjà fait pour le cours de Littérature, de retrouver "ma" classe. Ensuite je ne cacherai pas ma déception quand j'ai su que je ne vous aurai pas en tant que professeur de Philosophie, et j'ai toujours dit qu'un jour je tenterai quand même d'assister à un de vos cours, non pas pour vous comparer avec mon professeur, je n'ai pas besoin de ca. C'est bien connu, tous les Terminales veulent Monsieur Mousset. Je vous remercie de m'avoir accueillis et je voudrai ajouter que c'est avec plaisir que je reviendrai dans votre cours si je suis désormais la bienvenue.

Emmanuel Mousset a dit…

Les Terminales ont tort de "vouloir Monsieur Mousset", car c'est un prof qui est comme les autres profs, ni meilleur, ni pire, mais seulement un peu plus ancien que son collègue. Ce qui n'est pas en soi une supériorité ou un atout.

Anonyme a dit…

vous avez tout a fait raison monsieur mousset!!!! qelle idée de vouloir monsieur mousset c 'est par ce que vous ne l'avez pa bien sur !!!