samedi 20 septembre 2008

Mort d'un prof.

Hier, j'étais au collège de Wassigny, pour un débat-philo sur le thème: "Peut-on échapper à la dépendance?" A la même heure, 40 kms plus loin, à Saint-Michel, un professeur était retrouvé mort, pendu chez lui. La veille, Jean-Luc Bubert, c'est son nom, 38 ans, prof de sciences physiques au collège César-Savart, avait été mis en garde à vue. Des parents avaient porté plainte, l'accusant d'avoir frappé leur enfant d'un coup de poing pour être arrivé en retard en classe.

Ces faits sont graves, mais il n'y a aucun témoin. Le professeur était bien noté et expérimenté. Il n'a visiblement pas supporté d'être ainsi accablé. La vérité dans cette tragédie, personne ne la connaît, la police et la justice doivent faire leur travail. Mais un homme est mort, et c'est irréparable. Depuis plusieurs années, le corps professoral est livré, dans quelques affaires, à la rumeur et parfois à la vindicte publique, alors que la vérité n'a pas été tranchée. C'est injuste, dangereux, dramatique, quelquefois criminel, quand on salit des innocents.

Songe-t-on à la grande misère de certains collèges de France et de leurs enseignants? Ils se sentent isolés, mal formés, déconsidérés, en difficulté devant des classes difficiles, des élèves imprévisibles. Parfois, ils craquent, s'égarent. Je ne cherche pas à les excuser. Un homme est mort, le temps est au recueillement. Attendons que la lumière soit faite. Mais profitons-en aussi pour réfléchir: un enseignant qui, un bon matin, se retrouve dans une gendarmerie et à la une des journaux, comment réagit-il? Notre société médiatique et judiciarisante est devenue impitoyable aux individus, alors même qu'ils sont peut-être innocents (et même s'ils étaient coupables, il serait inacceptable de se comporter ainsi). Prenons garde à cette terrible dérive, dont les bons sentiments ne justifient rien. Un enfant aussi peut mentir.

Corinne Vibes, secrétaire départementale du syndicat enseignant SE-UNSA, a eu ce mot juste: "Si, dans le passé, l'opinion publique en général avait une tendance absurde à donner systématiquement raison aux professeurs, maintenant c'est plutôt l'inverse". C'est exact et c'est dramatique.

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