lundi 1 février 2010

Les yeux rougis.




Nous terminons cette semaine, avec les Littéraires, l'étude du chapitre III du De rerum natura de Lucrèce, commencée la semaine précédente. Je veux en finir avant les vacances, pour passer à la rentrée à autre chose. C'est un magnifique texte, très littéraire, l'auteur étant autant écrivain que philosophe. Du coup, j'ai envie de tout lire, j'ai du mal et quelques scrupules à charcuter l'ouvrage. Mais notre temps est compté et il faut préparer le bac. Avec Kant ou Hegel, je n'ai pas ce genre de problème : ils écrivent comme des cochons !

Autre problème, les thèmes abordés par Lucrèce : l'immortalité de l'âme, qu'il conteste, la crainte de la mort, qu'il décrit dans toute son horreur, avec parfois un réalisme très cru, choquant. Des collègues me disent que je ne devrais pas, que les adolescents sont fragiles, que ce texte pourrait les traumatiser, peut-être avoir sur eux une mauvaise influence. Je récuse toutes ces précautions : nos ados sont plus solides qu'on ne croit, et les adultes donneurs de leçons plus fragiles qu'ils ne paraissent.

Au contraire, il est bon, il est sain de parler de la mort. Si on ne l'aborde pas en philo, où alors ? Nulle part, et la douleur sera refoulée, ce qui n'est guère mieux. Non, la mort doit être méditée en classe, d'autant que Lucrèce nous offre une voie pour nous détacher d'elle, pour surmonter la peur qu'elle nous inspire. Et puis, ma pédagogie n'a rien de tragique ; je mets quand il le faut de la rigolade dans un sujet pourtant fort grave.

Il est vrai cependant que j'ai vu cet après-midi des yeux rougir et s'embuer à la lecture de Lucrèce et à l'écoute de mes commentaires. Les larmes font partie de la vie. Ne craignons rien de tout cela, exprimons-le, nous en sortirons grandis et gagnants. Que des jeunes filles s'émeuvent à la lecture de Lucrèce, voilà qui est plutôt rassurant pour leur avenir.

Vignettes 1 et 2 : la presse locale fait honneur à notre lycée, revenant sur le pin's et la journée portes ouvertes de samedi.

8 commentaires:

Anonyme a dit…

Et quelle voie Lucrèce nous offre-t-il pour nous détacher de la mort, pour surmonter la peur qu'elle nous inspire?

Emmanuel Mousset a dit…

La compréhension exacte de la vie, le refus des représentations imaginaires nécessairement erronées.

Anonyme a dit…

Trop imprécis pour m'être d'un quelconque secours... Merci quand même.

Emmanuel Mousset a dit…

On ne dit pas merci quand on est insatisfait. On n'attend pas non plus un "quelconque secours" d'un professeur de philosophie, sauf quand on est élève. Et encore, ça se discute ... La réponse à votre question est dans le chapitre III de l'ouvrage de Lucrèce, qui ne fait que 37 pages.

Anonyme a dit…

Je vous remerciais simplement de m'avoir répondu, car je suis polie.
Je n'attendais aucun secours de Vous, mais de Lucrèce.
Pas envie de lire un livre de ce genre en ce moment.

Emmanuel Mousset a dit…

La politesse n'est pas nécessaire aux échanges philosophiques, la sincérité est suffisante. Si vous attendiez un secours de Lucrèce, pourquoi poser la question à moi ? Si vous n'avez pas envie de lire un livre de ce genre en ce moment, pourquoi poser une question sur Lucrèce ?

Je vais sans doute vous paraître impoli, mais mon métier consiste à poser des questions, même si je ne suis pas tortionnaire de profession.

Anonyme a dit…

Je VOUS posais cette question, parce que c'est VOUS qui avez abordé le sujet dans votre billet. Je pensais donc que vous pourriez me fournir davantage d'explications.
Je n'ai pas envie de lire ce genre de livre en ce moment, certes, mais ces réponses auraient peut-être pu m'aider.
bstnc

Emmanuel Mousset a dit…

J'ai répondu, de façon succinte, mais j'ai répondu.