mercredi 7 décembre 2011

L'alpiniste et le galérien.



Il y a des moments comme ça, plutôt rares, où je me sens, lors d'une animation philosophique, alpiniste gravissant une paroi sans fin ou galérien ramant au milieu de l'océan. C'était le cas au collège de Crécy-sur-Serre, avec quatre classes successives d'élèves de Troisième, genre ados en crise, muets comme des carpes ou bien gloussant comme des poules. Pourtant, le sujet (en vignette) était supposé les accrocher. L'an dernier, ça s'était mieux passé.

Je ne dis pas non plus que ça s'est mal passé, mais j'ai eu du mal à les faire parler. Le langage, quel problème ! Et je suis persuadé qu'ils avaient des choses à dire. Un moment fort cependant, où je suis resté scotché à ma paroi et immobile au milieu de l'océan : quand une fille a avoué être "lesbienne" (c'est le mot qu'elle a employé)et toutes les difficultés que ça pouvait entraîner. Les ados sont comme ça : soit ils se taisent, soit ils lâchent tout et ce sont les adultes qui en sont presque gênés.

4 commentaires:

mimipostal a dit…

Il ne peut y avoir d'aveu mais seulement une "Révélation".Si je mets des guillemets à révélation, c'est pour souligner le terme. Il ne peut y avoir d'aveu pour un fait qui n'est pas une faute. De plus pourquoi utiliser les guillemets pour le mot lesbienne ? C'est un mot de la langue française.
Je trouve pour ma part que l'attitude de cette jeune fille est plutôt remarquable et qu'elle fait preuve d'un grand courage et d'une d'une force morale .

Emmanuel Mousset a dit…

J'ai employé le mot "aveu" parce que c'est le mode sous lequel la jeune fille s'est exprimée durant son intervention. Ca n'implique bien sûr aucun jugement moral de ma part ( la notion de "faute") puisque mon animation avait au contraire pour objectif de débusquer les préjugés discriminatoires.

Quant à l'utilisation des guillemets, il est d'ordre déontologique : je les mets toujours quand je rapporte les propos exacts d'une personne.

Je partage entièrement votre dernière phrase, qui traduit parfaitement ma pensée à l'issue de cette rencontre avec les élèves.

Hélène a dit…

Bravo à cette jeune fille, qui a fait preuve d'un grand courage, car l'adolescence est l'une des périodes les plus difficiles pour affirmer la moindre différence, celle-ci pouvant entraîner rejet, moqueries, etc.

Une question à l'auteur du blog : vous dites à demi-mot avoir été gêné par la déclaration de cette jeune fille. Pourquoi ? Lors d'un atelier sur la différence, ne pouviez-vous pas vous attendre à ce que l'orientation sexuelle soit évoquée ? Est-ce une différence gênante ?

On imagine également que le débat avec ces 4 classes ne s'est pas résumé au coming-out de la jeune fille ; ce débat a-t-il été riche ? D'ailleurs, comment les camarades de la jeune fille ont-ils réagi suite à son annonce ? Surprise, curiosité, rejet... ?

Merci d'avance pour vos précisions sur ce sujet très intéressant.

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne m'exprime jamais à demi-mot, je fais part de mes réactions telles que je les ai vécues dans l'instant. En l'occurrence, ce n'était pas de la gêne mais de l'étonnement devant un tel courage, car ce n'est pas fréquent chez les élèves (ils préfèrent généralement garder leur intimité pour eux et ils ont bien raison).

Oui le débat a été très intéressant, hormis la timidité naturelle des classes qui a parfois freiné la parole. Nous avons passé en revue toutes les formes de discrimination. Tout ça s'est fait dans la bonne humeur, sans dramatisation excessive. Un journaliste était présent et en a fait un article, évoquant y compris l'intervention de la jeune collégienne. Donc une matinée très positive selon moi.