samedi 11 octobre 2008

Promis juré!

Nous poursuivons avec les TL2 la liberté. Mais en a-t-on jamais fini avec elle, en philosophie? Cette fois, le sujet de dissertation est moins conventionnel que le précédent: promettre, est-ce renoncer à sa liberté? Un bien beau sujet, et ce n'est pas le cas de tous ceux posés au baccalauréat... Mais promettre, n'est-ce pas nécessairement renoncer à sa liberté? On s'engage, on ne peut pas reculer, on tient parole parce qu'on est "tenu" par sa parole. Si nous n'étions pas en philo, la question serait vite réglée, comme vous le constatez.

Mais en philo, ça ne se passe pas comme ça, aussi facilement. Il faut prendre au sérieux la question, l'analyser et la problématiser. De la façon suivante: promettre relève de la moralité, c'est un acte admirable. Cependant, la liberté est un état non moins admirable, le propre et la grandeur de l'homme. Comment est-il concevable de promettre et, ce faisant, de nier notre liberté? "Y a quéqu'chos' qui cloch' là-d'dans, j'y retourne immédiat'ment", chantait Serge Reggiani en reprenant Boris Vian. En philo, c'est pareil.

En discutant avec les élèves, nous trouvons cinq idées:

1- Promettre n'interdit pas de trahir sa promesse. Nous gardons cette possibilité, et certains ne s'en privent pas. Mais cette liberté n'existe que par le mal, ce qui est tout de même embêtant.

2- Ne pas tenir une promesse n'est pas nécessairement un mal. Promettre, c'est s'engager par rapport à un futur, proche ou lointain, qu'on ne connaît pas vraiment. Alors, il est toujours possible que la situation change, que les circonstances évoluent, que la promesse ne "tienne" plus alors qu'on serait prêt à la tenir. Une promesse devenue inutile, désuète, il est sage, intelligent, moral de ne pas la tenir.

3- Promettre, c'est renoncer à une liberté, celle de faire autre chose que ce que j'ai promis, ce n'est pas renoncer à toute sa liberté.

4- Personne ne nous oblige à promettre, sinon ce serait un ordre, et quand c'est la conscience qui nous presse, on a affaire à un devoir. Au départ, la promesse relève d'un choix, elle exprime donc notre liberté.

5- Promettre, c'est s'adresser à l'autre, établir une relation positive avec, lui apporter quelque chose, l'objet de la promesse, et en ce sens, quoi qu'on promette, on augmente sa liberté, en sacrifiant une petite part de la nôtre.

En conclusion, nous soutenons que loin de renoncer à la liberté, la promesse l'intensifie. De plus, promettre nous libère de la plus grande des prisons, le temps (une notion au programme). Car en anticipant l'avenir, la promesse le rend présent. De ce point de vue, elle abolit le temps.


PS: je salue mon ancien élève, Antoine, qui a laissé un commentaire à la suite du billet "Nostalgie lycée". Je lui précise que Lucas a peut-être été intéressé par le bouddhisme non seulement à cause du cours sur la religion mais de la petite conférence que j'avais donnée au CDI et où il était présent, attentif et notant tout, comme à son habitude (c'est ainsi qu'on fait les bons élèves!). Antoine peut bien sûr assister à mes cours, et je lui souhaite bon courage et réussite dans ses études d'histoire à Lille.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Je suis ravi de voir que vous avez gardé une si bonne impression de moi, mais peut-être que vous idéalisez un peu mon profil d'élève modèle...

En tout cas je m'en souviens très bien de cette conférence sur le bouddhisme. En un peu plus d'une heure et demie, j'avais l'impression d'avoir assimilé les principes fondamentaux du bouddhisme et les grands repères. Ca a été mon point de départ pour toutes mes recherches ultérieures, et aujourd'hui encore je me surprends à me dire "oh tiens, il en avait parlé Monsieur Mousset".