mercredi 30 septembre 2009

Evaluer en philo.




J'ai reçu aujourd'hui cette invitation de l'ACIREPH, une association de profs de philo dont je suis membre. Le sujet du colloque est primordial : L'évaluation en philosophie, quels problèmes ? Et des problèmes, il y en a pas mal. J'en sais quelque chose, moi qui suis revenu ce matin avec deux bons paquets de copies à corriger. C'est ainsi qu'on comprend que l'année scolaire est bien engagée !

mardi 29 septembre 2009

Billets de reprise des cours.


Il y a quelques temps, je vous ai présenté les billets d'absence que remplissent les enseignants lors de l'appel. Mais il y a aussi d'autres types de billets, complétés cette fois par les services de la Vie Scolaire, que tout élève doit le cas échéant montrer à son professeur pour pouvoir être admis en classe. L'obligation scolaire est assortie dans certaines circonstances d'une autorisation d'entrée. Une salle de classe n'est pas un moulin où entre qui veut quand il veut.

Le premier billet (en vignette) est rose saumon. Un élève en retard doit le montrer pour participer au cours. Comment définir le retard ? C'est quand on n'arrive pas à l'heure, me direz-vous. C'est plus compliqué que ça. Qu'est-ce qui définit les horaires dans un lycée ? Non pas la montre ou la pendule comme partout ailleurs mais la sonnerie qui indique le début et la fin de la séance. Sauf qu'au moment précis de son retentissement, les élèves ne sont pas sur leur chaise devant leur table mais en train de s'acheminer vers leur salle, dans le hall d'entrée, l'escalier ou le couloir.

De plus, s'il y a embouteillage (ce qui est fréquent), un cours ne commence jamais exactement à la seconde où se termine la sonnerie. Que faire alors ? Ma règle est simple, et mes élèves la connaissent : tant que la porte est ouverte, ils peuvent entrer. Généralement, je laisse l'entrée béante pendant l'appel, offrant une dernière chance aux retardataires. Mais une fois fermée, l'élève doit aller faire remplir le fameux billet saumoné, et ne même pas songer à frapper si la porte est définitivement close.

Il y a quelques jours, j'ai été un peu vache, et j'ai regretté. Deux élèves de 1ère L1, en ECJS, m'attendaient devant la salle de classe alors que nous étions au CDI. J'avais certes prévenu il y a quinze jours de cela, mais j'aurais pu franchement être un peu plus cool. Je les ai renvoyés à la Vie Scolaire pour qu'ils me présentent un billet de retard. C'était excessif, je n'aurais pas dû. J'espère qu'ils ne m'en voudront pas jusqu'à la fin de l'année !

Le deuxième billet concerne les absences. C'est plus facile, plus classique, moins sujet à litiges : un élève n'est pas là, c'est la Vie Scolaire qui est juge des raisons qu'il avance et qui décide de sa réintégration en cours. Le prof prend acte en visant le billet jaune, c'est tout. Le troisième billet, orange, concerne les départs à l'infirmerie. Il suffit qu'un élève lève la main et dise qu'il n'est pas bien pour que l'enseignant l'autorise à rejoindre l'infirmerie (nous ne sommes pas là pour juger de la véracité des dires de l'élève). Simplement, l'élève doit être accompagné par un de ses camarades, généralement le délégué de classe (mais à l'heure qu'il est, nous n'avons pas encore procédé à leur élection). Il n'y a pas de problème pour trouver un volontaire. C'est le seul sacrifice qu'un lycéen accepte avec plaisir. Au retour dans la classe, l'élève doit montrer son billet.

Comme vous le constatez, le système est assez bien fait. Il dissuade les tentations, il limite les abus, il interdit tout laxisme. Il n'est sûrement pas parfait, mais il n'est pas mal. Ces trois types de billets sont à détacher dans le carnet de correspondance. Nous savons donc très précisément où en est chaque élève en matière d'absence, de retard et de passage à l'infirmerie. C'est quand même bien fichu, l'Education Nationale !

En haut de la vignette, j'ai fait figurer la carte du lycéen, comme en juillet j'avais exposé la carte de l'enseignant.

lundi 28 septembre 2009

Difficile ...




Ci-dessus le dernier numéro du bulletin d'information du lycée, qui fait honneur au café philo et au ciné philo.

Ce dimanche, j'ai corrigé mes premières dissertations de l'année scolaire, avec ce constat à chaque fois stupéfiant : malgré mes indications fort précises concernant la présentation des devoirs, certains élèves passent outre. Alors qu'ils savent que je vais les pénaliser là-dessus. Il faudra qu'on m'explique un jour la nature humaine ...

Difficile aussi d'expliquer à certains élèves que mes conseils pour la dissertation ne sont pas des consignes à appliquer au pied de la lettre. Ils aimeraient tellement, et je les comprends ! Mais dans l'adaptation d'une règle, il n'y a rien de systématique, d'automatique ; l'intelligence, le discernement sont requis. Une méthode de philo, ce n'est pas une recette de cuisine. Et même celle-ci exige de l'art, du doigté, de la décision dans sa réalisation. Dans la gastronomie comme dans la philosophie, on ne peut pas faire l'économie de la réflexion.

dimanche 27 septembre 2009

La philo vaincra !




Hier soir, en entrant dans le Havana Café, l'établissement où se tient à Soissons notre café philo, j'étais quelque peu désespéré. Mais c'est souvent mon état psychologique avant une manifestation que j'organise ou que j'anime. La salle était vide, plongée à moitié dans la pénombre, je n'étais même pas certain d'avoir l'indispensable matériel de sonorisation. J'avais rendez-vous avec une journaliste pour lui présenter le programme de l'année et notre association. Mais je suis tombé sur un lapin ! Pour couronner le tout, il faisait un temps magnifique qui incitait plus à la promenade qu'à la philosophie, et Soissons était en fête. Bref, de quoi être désespéré ...

Et puis, la salle s'est remplie petit à petit, jusqu'à une vingtaine de participants (ce qui est un très bon chiffre pour ce café philo). Colette, la responsable de l'activité philo sur Soissons, est arrivée avec un carton contenant devinez quoi ? Une toute nouvelle sono ! Jean-Louis a fait les réglages et miracle, ça fonctionnait ! Il y a de quoi se réjouir quand on sait que les micros qui ne marchent pas et les enceintes qui crachouillent sont une énigmatique spécialité française. Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes philosophiques et ma désespérance passagère a fondu comme neige au soleil. Enfin pas tout à fait car rien n'est parfait : je n'ai pas digéré le lapin, la journaliste n'est pas venue.

L'animation s'est fort bien passée, du moins si j'en crois les leçons du debriefing auquel je me soumets après chacune de mes manifestations, dans la voiture sur le trajet du retour. Interventions nombreuses, variées, de qualité et dans la bonne humeur : c'est ce qui fait la réussite d'un café philo. Ah j'ai oublié de vous donner le sujet. C'était le même qu'à Saint-Quentin la semaine dernière (nos thèmes sont quasiment identiques) : L'écologie, est-ce bien sérieux ?

Dans l'assistance, j'ai eu le plaisir de retrouver Elodie, qui s'occupe du café philo de Tergnier, dont je vous ai déjà parlé, qui viendra à Saint-Quentin pour animer la séance de novembre, et peut-être aussi à Soissons ultérieurement. Il est bon que notre public s'habitue à des styles, des visages et des personnages différents. Ces dix dernières années, j'ai sans doute eu le tort de trop focaliser le café philo de Saint-Quentin sur ma personne. Il est temps de préparer la relève !

En vignettes, le programme des activités philo à Tergnier : café philo, conférence débat et atelier d'étude de texte philosophique. Dans l'Aisne, c'est sûr la philo vaincra !

samedi 26 septembre 2009

Un cowboy au lycée.


Vous vous souvenez peut-être de mon billet sur la pré-rentrée, le 1er septembre. J'avais noté, dans l'intervention du proviseur, cette anecdote amusante : la venue d'un jeune américain de Kansas City dans notre lycée, logé chez l'habitant, sous réserve qu'il n'y ait ni chat, ni tabac ! (deux raisons qui m'interdisent par exemple de le recevoir). Nous avons reçu l'appel, à diffuser aux parents d'élèves (en vignette).

Kansas City, on imagine tout de suite un cowboy. C'est idiot mais c'est comme ça ! J'espère que ce jeune homme viendra à mon café philo. C'est aussi ça la french touch. Trêve de plaisanterie, cette ouverture du lycée au monde est une excellente démarche. Nous recevons régulièrement des assistantes de langues vivantes, nous hébergeons des chinois. Pour les élèves qui ne peuvent pas aller à l'étranger, c'est l'étranger qui vient à eux, même si l'immersion linguistique n'est pas totale.

Je me prends à imaginer qu'on pourrait aussi accueillir des philosophes qui viendraient s'entretenir avec les élèves dans les classes. Après tout, la philosophie n'est-elle pas, à bien des égards, une langue étrangère, dotée d'un vocabulaire incompréhensible à celui qui ne l'a pas appris ? On ferait venir un docteur de la Sorbonne, qui paraîtrait aux élèves aussi étrange qu'un cowboy du Missouri (et même sans doute plus). Chez l'habitant, je suis sûr que le chat et le tabac ne le dérangeraient pas. Notre philosophe aura besoin de nicotine pour activer ses neurones et d'un chat pour méditer sur l'existence des créatures de ce monde. Une idée à creuser.

vendredi 25 septembre 2009

L'exclusion de cours.


Je crois n'avoir jamais exclu un seul élève de mes cours durant mes 16 ans de carrière. Pourtant, les occasions se sont présentées, surtout les premières années. Pourquoi ne l'ai-je pas fait ? D'abord parce que ça ne sert pas à grand-chose. L'élève s'en va, mais il revient, et tout recommence. Ensuite parce que l'élève turbulent ne demande parfois pas mieux que de quitter la classe. Pourquoi lui donnerais-je ce plaisir ? Enfin et surtout parce qu'il vaut mieux qu'un problème, quel qu'il soit (sauf gravissime), soit réglé au sein de la classe, entre le prof et les élèves.

Et puis, je ne veux pas sembler reporter une difficulté sur la Vie Scolaire, qui a d'autres chats à fouetter, si j'ose dire. C'est mon boulot de faire moi-même la police dans ma classe. Ceci dit, je comprends parfaitement les collègues qui procèdent à des exclusions (surtout au collège) : c'est souvent le seul moyen de ramener la paix dans une classe que d'en extraire l'élément facteur de trouble.

Cette semaine, j'ai reçu dans mon casier le formulaire qui permet d'exclure un élève de cours (en vignette). On croit souvent que cette décision est arbitraire, selon le bon vouloir de l'enseignant, pour ne pas dire à la tête du client. C'est faux. La procédure est réglementée par une très sérieuse circulaire nationale. Car exclure est en soi contraire à l'obligation scolaire. C'est pourquoi quatre conditions sont requises :

- La gravité : il faut constater un manquement grave qui empêche le fonctionnement normal du cours. Un élève ne peut pas être exclu parce qu'il a oublié de faire son travail ou qu'il est en retard.

- L'exception : l'exclusion doit être ponctuelle, ni reconduite, ni régulière, ni répétitive.

- L'accompagnement : l'élève exclu doit être astreint à un travail donné par le professeur.

- L'information : l'exclusion donne lieu à une note écrite et motivée au CPE et au chef d'établissement.

jeudi 24 septembre 2009

Le sexe en classe.

Faut-il parler de sexe en classe ? Question délicate. Dans certaines matières, elle ne se pose pas, en maths, physique ou langues. En philosophie, je n'y coupe pas. En ce moment, nous traitons du désir. J'aborde la question : l'amour est-il un sentiment égoïste ? Impossible de ne pas évoquer le lien avec la sexualité, l'égoïsme du plaisir physique (même quand on est deux !).

C'est cependant délicat. Le prof peut être mal compris, les élèves peuvent mal interpréter. Mes propos, retirés de leur contexte, deviennent des notes dans les cahiers dont la lecture peut parfois surprendre les parents. Le sérieux se transforme alors rapidement en graveleux, du moins dans la perception qu'on en a. Certains collègues préfèrent carrément s'autocensurer, pour ne pas risquer d'être embêtés.

C'est un tort. Il faut parler de sexe en classe, ne rien craindre des retombées. En Terminale, nos élèves ont en moyenne 17 ans. C'est jeune mais la maturité est là, plus grande qu'on ne croit (la tarte à la crème de "l'immaturité des jeunes d'aujourd'hui" m'énerve). Les adultes feraient mieux de se taire sur ce point, car parfois mal placés pour donner des leçons. Et faire confiance aux élèves (je ne parle bien sûr que des lycéens en fin de scolarité).

J'aborde le sujet sans modifier le style qui est le mien, mélange de rigueur et d'amusement. La philosophie est aussi une entreprise de désacralisation. Et dans le monde moderne, c'est le sexe qu'il faut désacraliser ! Les élèves, qu'on croit libérés sur ce point (à l'image de notre société) sont plus puritains (ou plus pudiques) qu'on ne croit. Dans une réflexion sur l'amour, certaines dissertations évacuent complètement la sexualité, ce qui est un peu fort de café. C'est au prof de montrer que la philo n'a aucun tabou, qu'elle peut tout penser, même le sexe. Et puis, quand j'en viens à Freud et à la psychanalyse, comment faire autrement ?