jeudi 7 octobre 2010

Attentat et révolution.

Après la récréation de 16h00, je monte dans ma classe, au troisième étage. Une odeur épouvantable se dégage de la salle voisine, où travaille mon collègue prof de philo. C'est une boule puante qui a été lancée. Et ça pue vraiment, jusqu'à chez moi ! Les élèves évidemment s'en donnent à coeur joie. Mon collègue est obligé de déménager, ce qui réjouit sa classe. L'attentat sème le désordre, effet probablement recherché.

Dans ma classe, les élèves s'éventent, pour chasser la mauvaise odeur pourtant tout à fait supportable. Quelques-uns sont en retard, parce que la grille d'entrée est bloquée. Que se passe-t-il ? Des manifestants venus de nulle part ont essayé de s'introduire dans l'établissement et de rallier à leur cause leurs camarades. Quelle cause ? Vaguement le mouvement contre la réforme des retraites. Sur Facebook, en rentrant, j'apprends que des lycéens de Condorcet ont voulu bloquer leur établissement, que les CRS sont intervenus. Mais quelle est la part de vérité dans tout ça ? Il y a quelques jours, c'est Chauny qui avait vu ses lycéens descendre dans la rue.

En l'espace d'une heure, j'ai donc vécu cet après-midi un attentat pour rire et une fausse révolution. Il n'empêche qu'un petit vent de perturbation soufflait aujourd'hui sur le lycée.

mercredi 6 octobre 2010

Mauvais départ.



Les résultats du devoir à la maison de ma première Scientifique sont très préoccupants. A la différence des L et ES, l'équilibre en faveur des moyens et bons n'est pas respecté : 11 n'ont pas la moyenne, 7 seulement l'atteignent ou la dépassent. C'est donc un rapport très mauvais. Hasard ou signe révélateur ? C'est la seule classe dans laquelle un élève (celui que j'ai appelé le gus dans un précédent billet) a eu l'outrecuidance de ne pas rendre son travail sans même prendre le soin d'inventer un prétexte. Ce genre de morgue est là aussi très mauvais signe.

Attention : je ne désespère pas. La classe est peu nombreuse (18 élèves), je vais pouvoir faire du cas par cas et ramener un peu d'ordre dans tout ça. Avec les S, c'est toujours très ambivalent : ce sont souvent des classes qui drainent les meilleurs éléments et ça se ressent, y compris en philosophie. Mais ça peut être aussi des glandeurs de première qui se foutent de ma matière parce qu'elle est à faible coefficient au bac. Si c'est l'explication, je vais dare-dare les remettre dans le rang, c'est-à-dire au boulot. Je mets les choses au clair avec eux demain, où je leur rends leurs tristes copies.

Voilà l'échelle des notes (à gauche la note, à droite le nombre d'élèves concernés) :

4 : 2 (ces deux-là n'ont vraiment rien foutu !)
6 : 1
7 : 1
8 : 2
9 : 5
10 : 1
11 : 1
12 : 2
13 : 2
14 : 1

mardi 5 octobre 2010

Le destin d'une classe.



J'ai terminé aujourd'hui de corriger les copies de mes ES. Voilà le résultat (à gauche la note, à droite le nombre de copies) :

7 : 1
8 : 4
9 : 8
10 : 4
11 : 4
12 : 2
13 : 3
14 : 5
17 : 1

Vous voyez le problème ? les moyens (10-11) sont peu nombreux, écrasés par les bons (à partir de 12) et surtout les pas bons (en dessous de 10). C'est l'anomalie : le groupe central devrait être logiquement beaucoup plus nombreux. D'où l'incertitude pour l'avenir : si la pression des pas bons est la plus forte, la classe basculera de leur côté, pour le malheur de tous. Mon boulot : inverser la tendance, remonter la pente, déplacer le centre de gravité vers les meilleurs, élargir au moins pour la prochaine fois le groupe des moyens. Y'a du boulot !

On ne peut pas savoir ce que sera le destin d'une classe. Mais une certaine fatalité se dessine dès le départ, sans deviner quelle direction elle prendra. Une classe, comme en politique, est traversée par des rapports de forces, au milieu desquels le prof doit enseigner comme une brute : s'appuyer sur les forces actives, lutter contre les forces d'inertie, ruser et frapper.

C'est un combat. Ce n'est surtout pas une tâche d'intellectuel, contrairement à ce qu'on croit ! Pas de raffinement, pas de subtilité, il faut travailler une classe au corps, quasi physiquement. La présence est plus importante que l'intelligence. Un intello au milieu d'élèves est mort, bouffé par eux ; les lycéens sont naturellement cannibales.

Pour les ES, rien n'est perdu, puisque le rapport entre les 10 et plus et les 9 et moins demeure en faveur des premiers. C'est l'inversion qui serait catastrophique. A ce sujet, j'ai quasiment terminé la correction de ma première classe de S : là on va vers la cata ! Je vous en reparlerai demain. Il va falloir que je réagisse. Comme une brute, je vous dis ...

lundi 4 octobre 2010

Sortie scolaire.


J'ai déposé au secrétariat de monsieur le proviseur mon traditionnel projet de sortie scolaire à Paris (voir vignette). Avec une nouveauté cette année : après le Père Lachaise et Montparnasse, je ferai visiter cette fois-ci le cimetière de Montmartre.

dimanche 3 octobre 2010

Premier devoir, prochain devoir.


Le premier devoir à la maison est toujours le plus facile, et pour le prof qui se doit d'être indulgent pour une première fois, et pour les élèves dont les erreurs sont pardonnables pour une première fois. D'où une évaluation très large. Voilà l'échelle des notes pour mes Littéraires, rendues vendredi (à gauche la note, à droite le nombre de copies) :

7 : 2
8 : 3
9 : 2
10 : 3
11 : 7
12 : 4
13 : 2
14 : 1
15 : 2
16 : 1

Commentaire : sept pas bons, dix moyens, dix bons et assez bons. Bref, un profil de classe L normal et prometteur. J'ai commencé tout ce dimanche à corriger les ES : c'est un peu moins bon sans être catastrophique, il y a du travail, c'est l'essentiel. Remise des copies dans la semaine.

Prochain devoir à la maison, à rendre le 18 octobre pour les L et ES, le 22 pour les S (voir vignette). J'ai choisi un sujet de dissertation provocateur (en général, on veut être libre et pas son contraire) et un texte à commenter très court pour ne pas encourager à une simple répétition, ici impossible.

samedi 2 octobre 2010

Le gus et la choute.

Jeudi, ramassage des copies en S : je m'approche d'un élève qui n'a rien devant lui ; je lui demande où est son devoir ; il me répond qu'il ne l'a pas fait. Je lui demande pourquoi ; il me dit qu'il ne sait pas. Moi ce que je sais, c'est que ce gus va passer un sale moment en ma compagnie : je le conduis illico au bureau de la vie scolaire, pour le confier à la salle de permanence où il devra faire ce qu'il n'a pas fait. Mais pas question qu'il ait une bonne note : les rigolos, je les soigne à ma façon, afin de leur passer l'envie de rigoler.

Vendredi, avec les ES, en plein cours, une élève rigole. Je lui demande pourquoi. Elle non plus ne sait pas. Je lui fais remarquer que nous ne sommes pas dans un "concours de bouffonneries" (sic). La petite se sent insultée, agressée, outragée. Pauvre choute ! Elle aussi, je vais la guérir de son absence de raisons, à tel point qu'elle saura désormais pourquoi elle rit, de même que le gus se trouvera des motifs d'oublier son travail.

Le drame de l'Education Nationale, c'est que les enseignants n'osent plus dire leur fait aux élèves. On se soumet à la fausse morale du "respect", on craint les traumatismes soi-disant induits, on redoute les prudences de la hiérarchie, on craint les parents qui défendent leurs chers enfants, on fait dans la psychologie de bazar. La seule chose que mérite un élève, c'est de se voir infliger la vérité sur lui-même. Et le prof est là pour ça. Je m'y adonne par devoir et avec jubilation.

vendredi 1 octobre 2010

Bernot philo.