Avant de commencer ce billet, une petite pensée: c'est le centième de ce blog lancé à la mi-août, que j'essaie de remplir quotidiennement et qui est, d'après les réactions qui me reviennent, beaucoup consulté. Le fait rare qu'annonce ce centième titre, c'est le rendez-vous avec des parents. Depuis quatorze ans au lycée Henri-Martin à Saint-Quentin, ça ne m'arrive quasiment jamais, et quand cela se fait, ce n'est pas plus d'une fois par an.
Pourquoi? D'abord parce qu'il y a la traditionnelle rencontre parents-professeurs en début janvier, qu'attendent les familles pour faire part de leurs doléances. Ensuite parce que les parents, contrairement à ce qu'on croit, ne se mêlent guère du contenu et du déroulement des cours. S'ils ressentent parfois le besoin d'intervenir, c'est moins pour un problème pédagogique que scolaire, matériel, administratif, et c'est la direction qui est interpellée. Même si une difficulté s'installait entre un élève et un prof, si un grief était à adresser à un enseignant, la plainte irait le plus souvent devant le proviseur, considéré comme le patron. C'est la vieille histoire qu'il vaut mieux aller voir le bon Dieu que ses saints.
Mais surtout, en Terminale, les élèves qui ont 17 ou 18 ans sont autonomes. Les parents se sentent moins le droit et le devoir d'intervenir, à la différence du collège. Le corps enseignant, contrairement là encore à ce qu'on croit trop souvent, est respecté, sa légitimé à régler les problèmes quand il y en a est reconnue, on lui fait confiance sans chercher à en savoir plus. D'autant que les parents en savent assez, sont correctement informés (de plus en plus et de mieux en mieux) par l'établissement.
La dernière raison que je vois à cette non intervention des parents (du moins à mon niveau et avec moi), c'est que je ne rencontre pas d'énormes ou d'anormales difficultés avec les élèves. Les mauvais résultats de certains sont sans mystère et remontent parfois à loin, les parents ne s'en étonnent donc pas et n'en attendent aucune explication particulière (qu'ils ont à vrai dire déjà).
Et puis, quand quelquefois des parents demandent à me rencontrer, ce n'est pas toujours pour ce qu'on croit, un problème, mais au contraire pour un bon élève dont les parents veulent s'entendre dire, de la bouche du professeur, qu'il est bon! Vanité bien pardonnable, à laquelle il m'est arrivé, je vous le jure, de coopérer.
En tout cas, nulle vanité, mais pas non plus, à mon avis, de gros problème dans le rendez-vous que j'ai eu avec des parents vendredi soir, car c'est là où je veux en venir dans ce centième billet. Rappelez-vous la confidence un peu troublante de cet élève (voir le billet du 16 novembre "Faire gaffe") à la fin d'un cours. J'ai donc pris contact avec les parents et nous nous sommes vus avant-hier.
La démarche de se rencontrer, c'est déjà le signe que ça ne va pas si mal que ça. C'est la preuve qu'entre l'élève et la famille, il y a communication et compréhension. Les élèves qui sont dans des situations vraiment difficiles, les parents hélas ne viennent pas et ne le souhaitent pas. C'est un peu comme chez le psychanalyste: quand on est dans son cabinet, ce premier pas équivaut à une demi-guérison.
Dans le cas présent, les notes (c'est l'élément objectif) montrent un premier devoir raté et un deuxième, surveillé, dont le résultat a été moyen. Donc rien d'anormal, pas de quoi s'alarmer. Le gros du problème est ailleurs, pas pédagogique ou scolaire mais plutôt psychologique: un jeune ne peut-il pas être perturbé par la philosophie et ses interrogations qui ne sont pas de tout repos (intellectuel)? Pour la plupart des élèves, non: ils prennent la philo comme un travail et s'y adonnent plus ou moins bien, sans états d'âme particuliers.
Mais certains esprits sensibles, prenant trop à coeur la matière, peuvent s'émouvoir de ses contenus, quand il est question de bien et de mal, d'amour et de mort, et bien d'autres choses encore qui font parfois chavirer une sensibilité. A moi de faire attention, de prendre mes précautions. Je leur ai expliqué que je mettais, dans mon enseignement, devant mes élèves, beaucoup de distance, aucun pathos ou présentation tragique (qu'on pourrait pourtant facilement imaginer, dans lesquels la philosophie pourrait se complaire).
Au contraire, j'essaie d'introduire de l'humour (qui vaut ce qu'il vaut!) et surtout je montre constamment aux élèves que la réflexion philosophique est un travail comme un autre, même s'il est vrai que ce n'est pas tout à fait un travail comme un autre. Les interrogations que nous posons, les pensées que nous développons n'ont de valeur, de pertinence, d'utilité que dans ce cadre si particulier de la classe. Mais une fois franchie la porte, une fois sorti, la vraie vie reprend ses droits, tout s'efface et ne réapparaîtra que lorsque l'élève, dans son travail à la maison ou sa participation en cours, reprendra la réflexion.
Un cours de philosophie n'est pas un cours de catéchisme. Il ne se donne pas pour objectif de sonder ni de changer les coeurs et les âmes. Ce n'est, je le répète, qu'un travail, qu'on fait parce qu'on doit le faire, et le mieux possible, tant qu'à faire. Le fin du fin, et je l'ai dit aux parents vendredi soir, ce serait de prendre ce travail comme un jeu, sérieux, mental, profond, mais rien qu'un jeu, qu'on oublie une fois qu'on l'a rangé dans sa boîte. Alors, nulle tourmente psychologique ne peut emporter le joueur, seulement la crainte de perdre ou l'espoir de gagner, c'est-à-dire ses notes dans l'année et ses résultats au bac.
dimanche 30 novembre 2008
samedi 29 novembre 2008
Le troisième devoir.
Journée-copies, comme je vous l'avais annoncée hier. La correction du troisième devoir, c'est aussi l'occasion de pas mal d'irritation. Au premier, l'indulgence s'impose; au deuxième, les erreurs majeures sont encore pardonnables; au troisième, elles deviennent des fautes difficilement acceptables.
Combien de fois ai-je dit à mes élèves qu'une dissertation de philosophie consistait d'abord et avant tout à répondre précisément à une question précise? Beaucoup trop ne le font toujours pas, ou ne parviennent pas à le faire. Les sujets étaient les suivants: Doit-on aimer la liberté? Faut-il se méfier de nos désirs? Il ne s'agit pas de dire tout ce qu'on pense sur la liberté et sur les désirs, mais de répondre à ces questions. C'est le b-a ba de la philosophie.
Et pour satisfaire à cet objectif, il faut PROBLEMATISER la question, repérer en quelque sorte son centre de gravité. Doit-on aimer la liberté? Il convient de s'interroger sur ce que la liberté a d'aimable... ou de détestable. Les caractéristiques de l'amour, que l'élève se doit de repérer, sont-elles applicables à la liberté? Voilà quelle est la vraie question à traiter, et non pas un blabla ou méli-mélo sur la liberté.
Même remarque, même exigence, même précision sur le deuxième sujet: pas d'inutiles considérations sur les bienfaits ou les dangers du désir, mais une réflexion qui parte de la méfiance et se demande si ce sentiment est applicable aux désirs. Est-ce si difficile? Et pourtant, beaucoup d'élèves ne le font pas, alors que j'ai lourdement insisté là-dessus.
C'est pénible, parce que certaines dissertations sont fort bien construites, correctement rédigées, très organisées, avec des idées développées, de véritables argumentations, bref quelque chose d'intéressant mais... qui ne répond pas explicitement à la question posée. Au mieux, je peux mettre 10 sur 20, mais pas au-delà, parce que l'objectif n'est pas rempli.
C'est rageant, autant pour l'élève que pour moi, car ses idées sont bonnes, et il aurait suffit qu'il les mette au service de la question posée pour que le résultat soit bien meilleur et que la note augmente nettement. A l'inverse, certains sont plus maladroits, maîtrisent moins l'écriture, développent insuffisamment leurs idées, se montrent confus, désordonnés... mais font l'effort de répondre à la question qu'on leur pose. Et ça change tout!
Il y a une coupable facilité d'échapper à ce qu'on vous demande, involontairement ou par ruse, même et surtout si on a les capacités de réflexion et de rédaction. Je ne peux pas le pardonner, je me dois de le sanctionner. Surtout lorsqu'il s'agit du troisième devoir, fait tranquillement à la maison.
Combien de fois ai-je dit à mes élèves qu'une dissertation de philosophie consistait d'abord et avant tout à répondre précisément à une question précise? Beaucoup trop ne le font toujours pas, ou ne parviennent pas à le faire. Les sujets étaient les suivants: Doit-on aimer la liberté? Faut-il se méfier de nos désirs? Il ne s'agit pas de dire tout ce qu'on pense sur la liberté et sur les désirs, mais de répondre à ces questions. C'est le b-a ba de la philosophie.
Et pour satisfaire à cet objectif, il faut PROBLEMATISER la question, repérer en quelque sorte son centre de gravité. Doit-on aimer la liberté? Il convient de s'interroger sur ce que la liberté a d'aimable... ou de détestable. Les caractéristiques de l'amour, que l'élève se doit de repérer, sont-elles applicables à la liberté? Voilà quelle est la vraie question à traiter, et non pas un blabla ou méli-mélo sur la liberté.
Même remarque, même exigence, même précision sur le deuxième sujet: pas d'inutiles considérations sur les bienfaits ou les dangers du désir, mais une réflexion qui parte de la méfiance et se demande si ce sentiment est applicable aux désirs. Est-ce si difficile? Et pourtant, beaucoup d'élèves ne le font pas, alors que j'ai lourdement insisté là-dessus.
C'est pénible, parce que certaines dissertations sont fort bien construites, correctement rédigées, très organisées, avec des idées développées, de véritables argumentations, bref quelque chose d'intéressant mais... qui ne répond pas explicitement à la question posée. Au mieux, je peux mettre 10 sur 20, mais pas au-delà, parce que l'objectif n'est pas rempli.
C'est rageant, autant pour l'élève que pour moi, car ses idées sont bonnes, et il aurait suffit qu'il les mette au service de la question posée pour que le résultat soit bien meilleur et que la note augmente nettement. A l'inverse, certains sont plus maladroits, maîtrisent moins l'écriture, développent insuffisamment leurs idées, se montrent confus, désordonnés... mais font l'effort de répondre à la question qu'on leur pose. Et ça change tout!
Il y a une coupable facilité d'échapper à ce qu'on vous demande, involontairement ou par ruse, même et surtout si on a les capacités de réflexion et de rédaction. Je ne peux pas le pardonner, je me dois de le sanctionner. Surtout lorsqu'il s'agit du troisième devoir, fait tranquillement à la maison.
vendredi 28 novembre 2008
Panique dans les têtes.
Où en suis-je dans mes corrections de copies? C'est la question que se pose régulièrement un enseignant, surtout quand les conseils de classe du premier trimestre approchent, dans dix jours en ce qui me concerne. Il faut alors boucler les moyennes, vérifier si chaque élève a bien ses trois notes (un devoir par mois). Vous connaissez ma mésaventure d'hier, où deux élèves m'ont joué un sale tour.
Il me reste des travaux à corriger, ceux des TES2 et des TL2, pour tout vous dire. Vous savez donc à quoi mon week-end va être essentiellement occupé. Car la semaine prochaine, je dois remplir les bulletins, et ce n'est pas une mince affaire. En attendant, j'ai distribué aujourd'hui à mes trois classes le prochain sujet (l'un est à peine corrigé, il faut lancer le suivant!), à rendre pour avant les vacances de Noël.
C'est ma stratégie, dont je vous ai déjà parlé à la Toussaint: profiter des vacances non pas pour partir en vacances, mais pour corriger des copies. Attention, je n'en tire ni gloire, ni fierté: je ne fais que mon métier, on me paie pour ça. Quant aux élèves, je respecte toujours le délai de trois semaines, minimum syndical en quelque sorte pour préparer, rédiger et rendre un devoir.
En distribuant les feuilles des sujets, j'ai eu droit à une question de trois élèves, à propos de l'un des sujets de dissertation: le travail contribue-t-il à unir ou à diviser les hommes? Voilà ce qui m'a été demandé, et qui m'a mis en rogne: que faut-il répondre à la question? Unir ou diviser? C'était moins bien dit que ça, mais ça voulait dire ça. A quoi j'ai rétorqué: la réponse, ce n'est pas à moi de vous la donner, c'est à vous de la chercher!
En vérité, que s'est-il passé dans la tête de ces élèves, et dans la tête de combien qui sont restés silencieux? Habituellement, les questions de dissertation appellent des réponses affirmatives ou négatives. Mais peu importe, ai-je dit aux élèves en début d'année: en philo, on ne raisonne pas en oui/non, comme l'âne ferait hi han. Malgré mon avertissement, les esprits ont besoin, pour leur confort, de ces deux petits mots très tranchés, sans nuance, sans subtilité, oui/non.
Du coup, quand ils découvrent une question, à la façon de celle portant sur le travail, qui échappe à cette facile dichotomie, ils se sentent perdus. C'est malheureux mais c'est ainsi. Pourtant, à savoir si le travail nous unit ou nous divise, il n'y a pas de quoi être perturbé. Mais non, le systématisme est plus fort que tout. La réponse ne rentre pas dans les deux cases oui/non, c'est la panique dans certaines têtes.
De quoi vraiment me mettre en rogne. Comme s'il n'existait pas une gamme très riche de réponses: peut-être, à condition que, oui mais, non sauf, oui en un sens et non en un autre sens, etc. On ne répond brutalement oui ou non que lorsqu'on est dans un constat d'évidence, pas dans une recherche de vérité. Dire oui ou non, c'est passer aux aveux devant le policier ou se marier devant monsieur le maire ou monsieur le curé, ce n'est pas penser. Le "ni oui ni non", c'est le jeu préféré du philosophe.
Il me reste des travaux à corriger, ceux des TES2 et des TL2, pour tout vous dire. Vous savez donc à quoi mon week-end va être essentiellement occupé. Car la semaine prochaine, je dois remplir les bulletins, et ce n'est pas une mince affaire. En attendant, j'ai distribué aujourd'hui à mes trois classes le prochain sujet (l'un est à peine corrigé, il faut lancer le suivant!), à rendre pour avant les vacances de Noël.
C'est ma stratégie, dont je vous ai déjà parlé à la Toussaint: profiter des vacances non pas pour partir en vacances, mais pour corriger des copies. Attention, je n'en tire ni gloire, ni fierté: je ne fais que mon métier, on me paie pour ça. Quant aux élèves, je respecte toujours le délai de trois semaines, minimum syndical en quelque sorte pour préparer, rédiger et rendre un devoir.
En distribuant les feuilles des sujets, j'ai eu droit à une question de trois élèves, à propos de l'un des sujets de dissertation: le travail contribue-t-il à unir ou à diviser les hommes? Voilà ce qui m'a été demandé, et qui m'a mis en rogne: que faut-il répondre à la question? Unir ou diviser? C'était moins bien dit que ça, mais ça voulait dire ça. A quoi j'ai rétorqué: la réponse, ce n'est pas à moi de vous la donner, c'est à vous de la chercher!
En vérité, que s'est-il passé dans la tête de ces élèves, et dans la tête de combien qui sont restés silencieux? Habituellement, les questions de dissertation appellent des réponses affirmatives ou négatives. Mais peu importe, ai-je dit aux élèves en début d'année: en philo, on ne raisonne pas en oui/non, comme l'âne ferait hi han. Malgré mon avertissement, les esprits ont besoin, pour leur confort, de ces deux petits mots très tranchés, sans nuance, sans subtilité, oui/non.
Du coup, quand ils découvrent une question, à la façon de celle portant sur le travail, qui échappe à cette facile dichotomie, ils se sentent perdus. C'est malheureux mais c'est ainsi. Pourtant, à savoir si le travail nous unit ou nous divise, il n'y a pas de quoi être perturbé. Mais non, le systématisme est plus fort que tout. La réponse ne rentre pas dans les deux cases oui/non, c'est la panique dans certaines têtes.
De quoi vraiment me mettre en rogne. Comme s'il n'existait pas une gamme très riche de réponses: peut-être, à condition que, oui mais, non sauf, oui en un sens et non en un autre sens, etc. On ne répond brutalement oui ou non que lorsqu'on est dans un constat d'évidence, pas dans une recherche de vérité. Dire oui ou non, c'est passer aux aveux devant le policier ou se marier devant monsieur le maire ou monsieur le curé, ce n'est pas penser. Le "ni oui ni non", c'est le jeu préféré du philosophe.
jeudi 27 novembre 2008
Une journée pas si particulière.
Quelle journée! Deux classes, deux élèves qui n'ont pas rendu leur copie, tous les deux absents le jour de la remise des devoirs, et qui n'ont rien dit une fois rentrés. Inacceptable et stupide! Ils devaient bien savoir que je finirais par savoir... Si encore ils avaient eu l'intelligence d'inventer une excuse vraisemblable! Même pas. Je n'en reviens pas, et je suis évidemment fort en colère. Ont-ils conscience de l'image, très négative, qu'ils donnent d'eux-mêmes en agissant ainsi? Je n'en suis même pas certain.
Ces deux-là, lecteurs réguliers de ce blog, vous les connaissez: ce sont les oreilles de Mickey (voir le billet du 24 novembre "Un problème d'écouteurs") et la cavalière (voir le billet du 12 septembre "Le jockey et le vendangeur"). Ils ne sont pas méchants, pourtant. Mais pourquoi ont-ils fait ça? Deux copies non rendues sur 89 élèves, ce n'est pas beaucoup, me direz-vous. Je vous répondrais que ce sont deux de trop. Je le vis comme une violation du contrat qui me lie aux élèves: rendre son travail au jour et à l'heure. Négliger ça, c'est porter atteinte à tout le reste.
En fin d'après-midi, réunion du CVL, Conseil de Vie Lycéenne: face-à-face, 5 adultes (un prof, deux parents, une infirmière, une surveillante) et 9 élèves (dont 5 à moi). Premier point à l'ordre du jour: la visite d'un élève du CVL à Xavier Darcos, le 15 novembre, pour parler de la nouvelle classe de Seconde. Deuxième point: le budget participatif, c'est-à-dire la jolie somme que verse la Région (près de 20 000 euros) pour des activités culturelles ou des aménagements matériels demandés par les élèves. Je compte bien, par ce biais, recommencer l'offre de 30 places gratuites pour les lycéens en vue des séances du Ciné-Philo.
Ces deux-là, lecteurs réguliers de ce blog, vous les connaissez: ce sont les oreilles de Mickey (voir le billet du 24 novembre "Un problème d'écouteurs") et la cavalière (voir le billet du 12 septembre "Le jockey et le vendangeur"). Ils ne sont pas méchants, pourtant. Mais pourquoi ont-ils fait ça? Deux copies non rendues sur 89 élèves, ce n'est pas beaucoup, me direz-vous. Je vous répondrais que ce sont deux de trop. Je le vis comme une violation du contrat qui me lie aux élèves: rendre son travail au jour et à l'heure. Négliger ça, c'est porter atteinte à tout le reste.
En fin d'après-midi, réunion du CVL, Conseil de Vie Lycéenne: face-à-face, 5 adultes (un prof, deux parents, une infirmière, une surveillante) et 9 élèves (dont 5 à moi). Premier point à l'ordre du jour: la visite d'un élève du CVL à Xavier Darcos, le 15 novembre, pour parler de la nouvelle classe de Seconde. Deuxième point: le budget participatif, c'est-à-dire la jolie somme que verse la Région (près de 20 000 euros) pour des activités culturelles ou des aménagements matériels demandés par les élèves. Je compte bien, par ce biais, recommencer l'offre de 30 places gratuites pour les lycéens en vue des séances du Ciné-Philo.
mercredi 26 novembre 2008
Les déçus du café philo.
Mais non, l'article est positif, et son titre doit être compris au second degré. Je vous cite le début:
"Parmi les déçus du café philo de la rue Charpentier doivent figurer ceux qui espèrent y trouver une réponse."
Et la fin de l'article:
"On aura compris, aucun consensus n'est obtenu, et ce n'est pas le but. Cette démarche philosophique sert à secouer les idées, à rendre intriguant ce qui pouvait paraître banal. Le café philo fait venir les gens avec une question, et les renvoie avec un questionnement. D'où son utilité citoyenne et démocratique."
Le journaliste a tout compris! Je ne saurais mieux dire. Moi aussi, parfois, je suis en butte à l'incompréhension de certains participants, qui saisissent mal et n'adhèrent pas à l'esprit café philo. Ils me réclament des références (ce n'est pas une conférence), ils voudraient un ordre précis (ce n'est pas un cours), ils souhaiteraient que je guide les débats (je ne suis pas ici professeur mais animateur), ils s'attendent à une conclusion (je n'ai aucun message à délivrer).
Le café philo, c'est la liberté d'échanger, le plaisir de se retrouver, rien de plus, rien de moins. Ca s'appelle café philo parce que le lieu est un café, que le sujet est philosophique et que l'animateur est prof de philo. Mais la comparaison s'arrête là. Et c'est suffisant. Après tout, la déception est une forme de pédagogie, le moyen de perdre ses illusions. De ce point de vue, elle est une étape de la philosophie.
mardi 25 novembre 2008
La Salle des Conseils.
La Salle des Conseils, c'est un terme très élyséen, qui désigne, dans mon lycée, la salle de réunion où se tiennent les conseils de classe, les conseils d'administration et toute sorte de réunions. Nous aurions pu l'appeler salle Henri-Martin, d'autant que le buste du personnage qui a donné son nom à l'établissement domine cette salle. Mais ça n'aurait guère été original. Quant à "salle de réunion", c'est d'un commun qui n'a pas sa place chez nous (plaisantons un peu, bien sûr...).
Ceci dit, c'est une magnifique salle, rénovée il y a plus de dix ans, et qui est encore comme neuve. Une grande table ovale, style conseil des ministres, occupe tout l'espace. Au fond, c'est la partie réservée à la direction, au dessous de deux drapeaux, français et européen. Au mur, il y a de jolis tableaux, qu'on peut toujours regarder quand on s'ennuie. Sinon, il ressort de cette salle une ambiance de chaleur, le bois de la table et du plancher y sont je crois pour quelque chose.
C'est surtout une salle qui donne le sentiment qu'il s'y passe des évènements importants, officiels, solennels, comme celui de ce matin, 11h00. Le chef d'établissement rencontrait un autre chef d'établissement, le proviseur du lycée européen de Villers-Cotterêts, pour signer une convention entre les deux établissements, qui permettra des échanges, des jumelages et des voyages, jusqu'en Chine! Ce matin, le vaste monde était convoqué dans la Salle des Conseils.
La scène m'évoquait une rencontre au sommet, entre chefs d'Etat, flanqués de leur Premier ministre, s'apprêtant à conclure une alliance, sous le flash d'un seul photographe, celui du journal L'Union. Mais qu'est-ce qui distingue un proviseur d'un proviseur-adjoint? L'un est plus âgé, l'autre plus jeunot. Détail amusant, l'adjoint de Villers est le portrait craché de Jean-Luc Mélenchon rajeuni!
Et moi, qu'est-ce que je faisais là? Les membres du conseil d'administration étaient conviés à la petite cérémonie, ainsi que les profs de langues. Mais j'ai raté le pot de l'amitié. Je devais filer à Hirson, pour animer un débat avec des lycéens, dont je vous parlerai peut-être demain.
Ceci dit, c'est une magnifique salle, rénovée il y a plus de dix ans, et qui est encore comme neuve. Une grande table ovale, style conseil des ministres, occupe tout l'espace. Au fond, c'est la partie réservée à la direction, au dessous de deux drapeaux, français et européen. Au mur, il y a de jolis tableaux, qu'on peut toujours regarder quand on s'ennuie. Sinon, il ressort de cette salle une ambiance de chaleur, le bois de la table et du plancher y sont je crois pour quelque chose.
C'est surtout une salle qui donne le sentiment qu'il s'y passe des évènements importants, officiels, solennels, comme celui de ce matin, 11h00. Le chef d'établissement rencontrait un autre chef d'établissement, le proviseur du lycée européen de Villers-Cotterêts, pour signer une convention entre les deux établissements, qui permettra des échanges, des jumelages et des voyages, jusqu'en Chine! Ce matin, le vaste monde était convoqué dans la Salle des Conseils.
La scène m'évoquait une rencontre au sommet, entre chefs d'Etat, flanqués de leur Premier ministre, s'apprêtant à conclure une alliance, sous le flash d'un seul photographe, celui du journal L'Union. Mais qu'est-ce qui distingue un proviseur d'un proviseur-adjoint? L'un est plus âgé, l'autre plus jeunot. Détail amusant, l'adjoint de Villers est le portrait craché de Jean-Luc Mélenchon rajeuni!
Et moi, qu'est-ce que je faisais là? Les membres du conseil d'administration étaient conviés à la petite cérémonie, ainsi que les profs de langues. Mais j'ai raté le pot de l'amitié. Je devais filer à Hirson, pour animer un débat avec des lycéens, dont je vous parlerai peut-être demain.
lundi 24 novembre 2008
Un problème d'écouteurs.
J'ai deux élèves, sur 89, qui arrivent en classe avec deux énormes écouteurs autour du cou. On dirait des oreilles de Mickey. Ca les fait ressembler à des personnes travaillant à la radio ou dans un cockpit d'avion. C'est très bizarre, mais je suis sans doute le seul à trouver ça très bizarre. L'un de ces casques est d'un rose très voyant. Ces élèves ne s'en servent pas, du moins devant moi. D'autres élèves, dans le lycée, se baladent certes avec des écouteurs, mais ce sont de petits fils discrets à l'oreille.
Les deux élèves en question travaillent normalement, me semble-t-il. Rien en eux, pour le moment, ne trahit une certaine distraction. Il n'empêche que cette image qu'ils donnent d'eux-mêmes n'est pas vraiment positive. Porter un casque musical signifie qu'on a écouté ou qu'on va écouter de la musique, à l'intérieur de l'établissement, entre deux cours ou à la récréation.
Est-ce choquant? Pas vraiment, nous avons un foyer avec billard et télévision allumée. Le lycée n'est donc pas un lieu intégralement consacré au travail. Un peu de divertissement y a sa part, de fait. Mais l'exhiber aussi ostensiblement est peut-être aussi contestable que l'affichage d'un signe religieux. Les écouteurs pourraient rester dans le sac. Mais comme ils sont vraiment gros, je suppose qu'il y a un problème de place.
Et puis, sortir son portable après le cours, est-ce mieux? Pas certain. Pourtant, cela se fait, et chez moi, il n'y pas pour autant trouble à l'ordre scolaire. Moi aussi, il m'arrive de téléphoner, sans me cacher. Le problème de ces écouteurs (si problème il y a!), c'est comme la dimension d'une croix ou d'une médaille, c'est leur grosseur. Je ne dirais pas qu'ils font du prosélytisme, mais leur présence est tellement visible et incongrue dans une salle de classe qu'elle passerait presque, aux yeux d'un enseignant mal intentionné, pour une revendication ou même une provocation. C'est qu'ils sont gros, vraiment gros, ces écouteurs, et qu'ils font une drôle de tête à ceux qui les portent!
Je pourrai les interdire, exiger la discrétion, mais encore une fois, ce que je vois moi, personne ne semble le remarquer ni s'en offusquer. Donc je laisse faire. Mais si tous les élèves venaient avec cet attirail autour du cou, la situation deviendrait surréaliste et franchement gênante. Le philosophe Emmanuel Kant nous explique qu'une proposition est moralement acceptable quand elle est universalisable. Là, ce n'est pas le cas! Mais j'ai choisi de ne rien dire parce que, encore une fois, il n'y a pas trouble à l'ordre scolaire, et c'est pour moi l'essentiel. Et puis, en interdisant les deux machins, peut-être que je créerais un problème qui n'existe pas, sinon que pour moi. Allez savoir...
Les deux élèves en question travaillent normalement, me semble-t-il. Rien en eux, pour le moment, ne trahit une certaine distraction. Il n'empêche que cette image qu'ils donnent d'eux-mêmes n'est pas vraiment positive. Porter un casque musical signifie qu'on a écouté ou qu'on va écouter de la musique, à l'intérieur de l'établissement, entre deux cours ou à la récréation.
Est-ce choquant? Pas vraiment, nous avons un foyer avec billard et télévision allumée. Le lycée n'est donc pas un lieu intégralement consacré au travail. Un peu de divertissement y a sa part, de fait. Mais l'exhiber aussi ostensiblement est peut-être aussi contestable que l'affichage d'un signe religieux. Les écouteurs pourraient rester dans le sac. Mais comme ils sont vraiment gros, je suppose qu'il y a un problème de place.
Et puis, sortir son portable après le cours, est-ce mieux? Pas certain. Pourtant, cela se fait, et chez moi, il n'y pas pour autant trouble à l'ordre scolaire. Moi aussi, il m'arrive de téléphoner, sans me cacher. Le problème de ces écouteurs (si problème il y a!), c'est comme la dimension d'une croix ou d'une médaille, c'est leur grosseur. Je ne dirais pas qu'ils font du prosélytisme, mais leur présence est tellement visible et incongrue dans une salle de classe qu'elle passerait presque, aux yeux d'un enseignant mal intentionné, pour une revendication ou même une provocation. C'est qu'ils sont gros, vraiment gros, ces écouteurs, et qu'ils font une drôle de tête à ceux qui les portent!
Je pourrai les interdire, exiger la discrétion, mais encore une fois, ce que je vois moi, personne ne semble le remarquer ni s'en offusquer. Donc je laisse faire. Mais si tous les élèves venaient avec cet attirail autour du cou, la situation deviendrait surréaliste et franchement gênante. Le philosophe Emmanuel Kant nous explique qu'une proposition est moralement acceptable quand elle est universalisable. Là, ce n'est pas le cas! Mais j'ai choisi de ne rien dire parce que, encore une fois, il n'y a pas trouble à l'ordre scolaire, et c'est pour moi l'essentiel. Et puis, en interdisant les deux machins, peut-être que je créerais un problème qui n'existe pas, sinon que pour moi. Allez savoir...
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